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​Mohamed Tazi (Amith) : "Le Maroc continue de subir des règles anachroniques face à l'Europe"

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8 nov. 2015

Alors que le salon Maroc in Mode a tenu sa 13ème édition à Marrakech du 4 au 6 novembre, le directeur de l'Amith (association marocaine des industries du textile-habillement), Mohamed Tazi, a évoqué pour FashionMag l'impact des taux de change, le regain de l'export vers les États-Unis, et surtout les conditions douanières imposées par l'UE, à l'heure où le grand concurrent turc profite d'avantages importants. 

Mohamed Tazi - MG-Fmag


FashionMag : Les taux de change ont-ils bénéficié au textile-habillement marocain ? 

Mohamed Tazi : Nous avons été impactés par la baisse de l'euro. Cette baisse a été de l'ordre de 4 % par rapport au dirham. Mais, comparativement à nos concurrents qui ont pour certains subi des réévaluations de 20 % de leur monnaie face à l'euro, nous ne connaissons pas un effet de la même ampleur. En revanche, le dollar, qui a pris du poids face à l'euro, a permis à de nombreux acteurs qui avaient mis de côté le marché américain dans leur stratégie de développement, d'opérer un repositionnement vers ce marché précédemment délaissé. Le marché redevient intéressant pour un certain nombre d'acteurs marocains. 

FM : L'appétence croissante des Etats-Unis pour la fast fashion soutient-elle le phénomène ? 

MT : Les Américains ont véritablement envie de travailler via le système de fast fashion, pour laquelle le Maroc apporte une réponse forte. Néanmoins, ils n'y parviennent pas souvent. Mais un certain nombre d'acteurs sont présents chez des acteurs marocains clefs opérant sous le modèle Inditex. Et aujourd'hui, il y a des essais assez prometteurs. Nous réalisons 250-300 millions de dirhams d'exportations vers les Etats-Unis, ce qui n'est pas beaucoup sur notre total de 31 milliards. Mais je pense qu'en 2015, fort de ce contexte, nous dépasserons les 400 millions. 

FM : La concurrence turque est-elle toujours un frein au développement du textile marocain ? 

MT : La Turquie a des atouts que le Maroc essaie d'avoir. Sa principale force est sa capacité à offrir un produit complet, grâce à une puissance de l'offre que l'on souhaiterait avoir. Mais les statistiques européennes de l'été, au moment où la Turquie a perdu des points, montre que le Maroc en a gagné. Je ne peux pas dire que nous sommes réellement concurrents. Nous le sommes sur certains produits, mais nous sommes aussi complémentaires sur d'autres. Beaucoup de supports turcs sont utilisés par les entreprises marocaines pour exporter vers l'Europe, qui reste notre marché clef. 

FM : Croyez-vous en une évolution rapide des conditions d'exportation vers l'Europe ? 

MT : C'est une problématique véritablement cruciale. Nous assistons depuis 20 ans à un effritement des préférences accordées précédemment par l'Union européenne au Maroc. Elles se sont effilochées. L'UE accorde aujourd'hui à certains pays des préférences pour des raisons stratégiques et géopolitiques, en matière de règles d'origine. Et laisse au passage le Maroc et la Tunisie pénalisés. C'est un vrai sujet qui nous préoccupe, et que nous suivons de près depuis 2012 et le processus de Barcelone. Les discussions s'enlisent et n'arrivent à pas à aboutir sur des demandes simples. Nous ne demandons pas des avantages accordés aux pays membres, comme la simple transformation des produits. Ni des avantages accordés via l'union douanière, comme c'est le cas pour la Turquie. On demande simplement que l'on revoit le processus, notamment sur la teinture. Les mesures protectionnistes actuelles datent d'il y a vingt ans. Aujourd'hui, il reste peu de teinturiers sur place. Mais le Maroc continue de subir des règles anachroniques face à l'Europe. 

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