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Chantal Gaemperle (LVMH) : "Le luxe est un monde de paradoxes et de tensions"

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29 nov. 2017

LVMH a inauguré lundi à Florence son premier programme de formations professionnelles en Italie, où il a installé une antenne de son Institut des Métiers d’Excellence (IME). A cette occasion, Chantal Gaemperle, directrice des ressources humaines et synergies du groupe, a décrit à FashionNetwork.com les nouveaux besoins de l’industrie du luxe.

Chantal Gaemperle, directrice des ressources humaines et synergies du groupe - LVMH


FashionNetwork.com : Vous avez noté des pénuries dans certains métiers, qui vous ont poussé à mettre en place certains programmes de formation professionnelle ?

Chantal Gaemperle :
C’est effectivement la logique de cette démarche. Mais ce n’est pas aussi simple. Cela part d’un besoin que l’on essaye d’anticiper. Mais lorsque l’on parle de développement humain, cela prend du temps. Notre conviction, c’est que l’homme ou la femme font la différence. Dans leur travail, nos artisans transmettent non seulement la qualité de leur savoir-faire, mais aussi leur fierté de réaliser un beau produit. Ce sens-là de fierté et d’excellence, on le retrouve ensuite partout. C’est primordial aujourd’hui, où le niveau d’exigence des clients est très élevé.

FNW : En quoi ces formations professionnelles sont-elles aussi importantes pour un groupe comme LVMH ?

CG :
  Ces formations permettent de transmettre les savoir-faire, préserver certains métiers qui sont en train de se perdre et avoir des artisans formés à l'excellence. Mais il y a aussi d'autres éléments. Il y a en effet une foule de métiers qui ne sont pas connus. Ce genre de formation permet aux jeunes de découvrir la richesse de ces métiers, mais aussi de notre côté, cela peut nous permettre de repérer et révéler des passions parmi ces jeunes apprentis.

FNW : Les ouvriers-artisans sont au cœur du produit et donc de cette industrie. Quelle est votre politique salariale envers eux ?

CG :
Je pense que nous sommes un employeur responsable. Mais avant de parler de salaire, il faut d’abord souligner que nous offrons une perspective à des jeunes qui n’en ont pas. On leur donne une qualification, qui va leur permettre d’être indépendants. La dernière promotion de notre Institut des Métiers d’Excellence affiche 96 % de réussite, 90 % d’entre eux ont trouvé un débouché, 65 % dans notre groupe ou auprès de nos partenaires.

FNW : La formation, que vous venez de lancer en Italie est dédiée à la maroquinerie et à l'orfèvrerie, et s’étendra aussi à la chaussure et à la vente. Quelle est l’importance aujourd’hui du vendeur pour un groupe de luxe ?

CG :
Ce métier est primordial. L’un de nos défis est justement de mieux expliquer l’avenir de la distribution et du retail. L’univers concurrentiel s’est durci et l’expérience en magasin est de plus en plus nécessaire, d’où l’importance de créer des formations d’excellence en la matière. Nous en avons déjà lancé une à Paris et nous allons en mettre en place une autre aussi en Italie. Nous aimerions aussi créer une communauté pour le retail au niveau du groupe, comme nous l’avons déjà fait par exemple en créant un réseau de femmes ou au niveau des régions, pour mieux faire circuler les expériences des uns et des autres.

FNW : Avec le digital, la connaissance de la technologie est un élément qui pèse dans vos recrutements ?

CG :
Oui, bien sûr, la technologie est devenue un élément très important. Mais la part de la technologie ne doit pas faire oublier la dimension humaine.

FNW : Comment ont évolué au cours de ces dernières années les profils que vous recherchez ?

CG 
: Nous vivons des transformations et des incertitudes majeures. Nous recherchons donc des personnes qui soient capables de gérer les ambiguïtés et les changements. Travailler dans le luxe, c’est accepter l’ambiguïté. Cela signifie accepter la part d’incertitude et de devenir des choses, car nous sommes dans un processus de créativité. Le luxe est un monde de paradoxes et de tensions. D’un côté, il y a l’élément artisanal, les savoir-faire, la tradition. De l’autre, le développement mondial. Nous cherchons des profils qui voient dans ces tensions un défi qui les intéresse.

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