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L'Afrique, berceau des futurs stars du mannequinat

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18 janv. 2018

Abidjan, 18 jan 2018 (AFP) - « Allez ! On regarde droit devant soi. On jette la jambe ! On garde la ligne ! » ordonne le chorégraphe Franck Akesse aux apprentis-mannequins, lors d'un cours de défilé de l'agence de Fatim Sidimé, top model ivoirienne.

Naomi Campbell, ici pour H&M, fait partie des modèles pour les jeunes mannequins africains - H&M


Femmes et hommes, les aspirants aux podiums paient 15.000 F CFA (23 euros) par mois pour cette formation (six mois), avec l'espoir de vivre plus tard de ce métier.

« Depuis que je suis toute petite, j'ai toujours voulu être mannequin », assure Kelly Godo, 21 ans, étudiante en Master de droit. « J'aimerais bien devenir une nouvelle Naomi Campbell ou une Awa Sanoko (mannequin ivoirienne, Miss Model of the World 2015). »

Les top models africains ont le vent en poupe. La Soudanaise Alek Wek, l'Ethiopienne Liya Kebede ou encore l'Angolaise Maria Borges trustent les couvertures de magazines comme les podiums.

En 2017, pour la première fois de l'histoire, un quart des mannequins engagés pour les défilés du printemps à New York, Paris, Londres et Milan n'étaient pas blancs (25,4 %), selon un rapport du site spécialisé sur la mode The Fashion Spot. Parmi ces mannequins non blancs, 10,3 % étaient noirs et 7 % asiatiques, sur 299 défilés et 8 832 apparitions de modèles. Et en 2016, parmi les 20 top modèles les mieux payés au monde, il y en avait trois non blanches.

« Il faut apprendre et travailler mais j'espère que ça va marcher », dit Kelly Godo, qui a le soutien de sa famille et rêve d'un avenir dans le mannequinat.

Malgré l'absence de chiffres concrets, les professionnels sont plutôt optimistes, jugeant leur métier en « pleine expansion » à tous les niveaux. Les mannequins africains « s'exportent » bien et il y a aussi beaucoup de travail en Afrique : les capitales africaines sont devenues des rendez-vous importants de la mode au niveau local, avec des Fashion Weeks et des défilés à Abidjan, Lagos, Nairobi, Dakar, Capetown, Yaoundé, Johannesburg, Accra... Des shows notamment retransmis sur la chaîne Fashion Africa TV, consacrée presque uniquement aux défilés en Afrique.

« La mode pèse dans les économies et ici on peut tout faire », souligne le styliste le plus célèbre de Côte d'Ivoire, Reda Fawaz, selon qui près de 300 000 personnes travaillent dans le secteur en Côte d'Ivoire. « Les mannequins sont intégrés dans le système. Il y en a pour les défilés, pour la pub, pour les visuels... Nous (créateurs), on essaie de les valoriser. Et ils peuvent vivre de leur travail », assure-t-il.

Liya Kebede et sa carrière inspire les prétendants - Mango


La croissance de la mode en Afrique a même fait naître une nouvelle demande pour des mannequins femmes aux formes plus arrondies.

« Il y a des shows avec des mélanges de morphologie. Certains créateurs estiment que les mannequins qui les font vendre sont celles qui répondent aux normes de leur clientèle », explique Fatim Sidimé, qui a monté une agence de communication et de mannequinat : « la femme africaine est en général très arrondie » et certains optent ainsi pour des mannequins « plus en chair ».

Indépendamment de la couleur de peau, « pour les défilés haute couture, on va aller vers des mannequins filiformes, grandes et minces », souligne Fatim. Mais « il faut faire la promotion de la diversité : c'est une terre multicolore, il n'est pas question qu'on marginalise une couleur de peau ».

Les cachets pour les défilés sont variables. Une mannequin reconnue peut toucher entre 100 000 et 200 000 FCFA (150-300 euros) par créateur.

Mais le métier en Afrique n'est pas toujours rémunérateur. Bien que très courtisé par les créateurs et marques, l'élégant Ivoirien Jean-Paul Daffot ne peut vivre uniquement de la mode et doit exercer un deuxième métier. « Je suis DG (directeur général) d'une société de construction et je suis top model », affirme-t-il, en évoquant la concurrence des amateurs et des réseaux sociaux qui font baisser les cachets.

Mandjalia Gbané, Miss Côte d'Ivoire 2017, peut, elle, s'offrir un an sans défiler grâce à son titre. Mais « il y a beaucoup de problèmes », confie-t-elle. « A part certains créateurs ou grandes marques, on a parfois du mal à se faire payer. Certains tentent de profiter, paient mal et tirent les cachets vers le bas. Il faut organiser tout ça et ça ira mieux. »

Des mannequins en Afrique peuvent ainsi défiler pour 10 ou 20 000 (15-30 euros) voire « pour rien ou des promesses », explique-t-on dans le secteur.

« Il y a un avenir dans le mannequinat, mais il fallait structurer la profession et c'est ce qu'on fait en ce moment », commente Fatim Sidimé, qui dit se réunir régulièrement avec des créateurs, des mannequins et même des politiciens.

Ce métier, « c'est dur, mais c'est comme ça dans tous les secteurs ». Et si certains mannequins ne font que « deux ou trois shows » en un mois, ils peuvent toutefois être payés « plus qu'un citoyen lambda », souligne-t-elle.

Lors des Awards africains du mannequinat à Abidjan, la ministre ivoirienne de l'Education nationale, Kandia Camara, a appelé de ses voeux la création d'une école de mannequinat, soulignant que c'était un secteur pourvoyeur d'emplois.

A 18 ans, la lycéenne Gnimimeto Koné, 1m83 et déjà très remarquée sur les podiums, assure qu'elle ne va pas arrêter les études mais regarde clairement vers la mode : « J'adore ça ! » dit-elle. « A chaque défilé, on touche (...) On peut en vivre ». « J'espère être un grand mannequin international, si je reçois un coup de fil... »

Par Patrick Fort

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