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Un ambassadeur de la coiffure française au pays des polders

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14 mai 2006

LA HAYE, 14 mai 2006 (AFP) - Dans son salon, le Français Alexandre Pirès, installé à la Haye depuis dix ans, ne se contente pas de coiffer : ses clients, prestigieux ou non, viennent aussi le voir pour refaire le monde en sirotant un verre de vin.


Alexandre Pirès, l'ambassadeur de la coiffure au Pays Bas
Photo : Maartje Blijdenstein/AFP

"La France est un produit de luxe et, ici, on ne fait que la vendre", sourit-il, debout dans son petit salon aux murs jaune clair et aux sièges bleu azur.

Il y a dix ans, une chaîne française de salons l'envoyait en ambassadeur de la coiffure française à La Haye. Six ans après, il ouvrait son propre établissement.

"Mon agenda était plein dès les premiers jours car les coiffeurs hollandais (dont la formation ne dure qu'un an contre quatre en France) sont vraiment les plus mauvais de toute l'Europe ! Ca, c'est leur passé de puritains calvinistes", s'indigne-t-il.

La Haye, siège du gouvernement néerlandais et surnommée "la capitale du droit international", abrite non seulement plusieurs tribunaux internationaux, mais aussi les ambassades et une dizaine d'organisations internationales, comme l'organisme européen de coopération policière Europol.

Et si Alexandre Pirès parle aussi anglais et néerlandais, c'est pour mieux "faire le lien". "Les expatriés, qui constituent 90% de ma clientèle, sont souvent complètement déconnectés de ce pays", s'étonne ce fils d'exilés politiques portugais qui a grandi à Tours.

"Mais moi, je lis les journaux hollandais tous les matins, alors on parle de l'actualité néerlandaise et française". Comparer les mérites respectifs des deux pays est l'un des dadas du coiffeur, qui réserve à chaque cliente un heure de son temps, café ou verre de vin compris.

"C'est bien plus qu'il ne faut pour faire une coupe, une couleur et un brushing", admet-il. Mais les sujets de polémique ne manquent pas : émeutes des banlieues en France, manifestations contre le CPE (le contrat-jeunes, ndlr), montée du populisme aux Pays-Bas et... guerre en Irak.

Avant mars 2003, le coiffeur, farouche opposant à l'invasion américaine de l'Irak, croisait régulièrement le fer avec une cliente un peu particulière : la femme de l'ambassadeur des Etats-Unis.

"Quand une femme veut être belle, vous savez, ce sont ces cheveux qui comptent et non la diplomatie !", en rit-il aujourd'hui. Alors que Dominique de Villepin ferraillait à l'Onu, Alexandre Pirès défendait avec passion la position de la France dans son salon.

"J'étais la voix de la France en direct, à tel point que son mari lui a demandé de ne plus venir, mais elle a continué car elle adorait qu'on échange nos points de vue !"'

La qualité de la conversation, voilà ce qui fait selon Alexandre Pirès la qualité d'un client. Et le coiffeur ajoute qu'avec "le président de la Cour pénale dont les Américains ne veulent pas (Philippe Kirsch et sa femme), très francophiles", il "adore refaire le monde".

Le coiffeur, qui se veut un passeur, a "horreur des clichés". Les coffee shops ? "Les Français pensent que les Pays-Bas sont une sorte de paradis artificiel, alors qu'ils fument bien plus de cannabis que le Hollandais moyen", s'enflamme-t-il.

Gabi Kühn, une de ses clientes néerlandaises, vient chez Alexandre parce qu'elle aime "ses coupes classiques", mais aussi "pour parler français". Le salon d'Alexandre est "un petit bout de France", dit-elle. "On y écoute de la chanson française et il a même accroché au mur la déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 !"

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