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5 mars 2017
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Un casting de mannequins révèle une face sombre du monde de la mode

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AFP
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5 mars 2017

Les coulisses des défilés sont parfois moins glamour que les podiums, comme le montre une polémique autour de mannequins forcées d'attendre des heures dans un escalier lors d'un casting pour une grande griffe, à l'occasion de la Fashion Week parisienne.

Le dernier défilé femme de Balenciaga en septembre 2016 - © PixelFormula


Déjà critiquée pour le très jeune âge et la maigreur de ses mannequins, l'industrie de la mode est de nouveau épinglée à la suite de l'affaire révélée par le directeur de casting américain, James Scully. Sur Instagram, cet « insider » a accusé lundi deux de ses concurrents de se livrer à un traitement "sadique et cruel » envers des modèles dans un « post » largement relayé dans les médias.

Plus de 150 mannequins ont été coincées dans un escalier et laissées un moment dans le noir avant de passer les sélections pour le défilé Balenciaga, selon James Scully, citant des témoignages.

Deux mannequins ont affirmé à l'AFP avoir été forcées d'attendre plus de trois heures, sans aucun accès aux toilettes. « C'est le pire casting que j'aie jamais passé », a déclaré l'ex-mannequin de Gucci, Anna Vivchar, 19 ans, qui a préféré partir car elle ne pouvait plus se retenir. « Tout le monde était nerveux et échauffé. »

Cette version a été totalement contestée par l'une des deux responsables du casting mis en cause, Maida Gregori Boina, qui a affirmé que les mannequins n'avaient pas attendu « ne serait-ce qu'une heure dans le noir ». « Tout au long de ce casting, nous avons assuré les conditions les plus confortables possibles » compte tenu de la situation, a déclaré cette figure du milieu de la mode au site spécialisé « Business of fashion ».

Balenciaga (groupe Kering) n'en a pas moins rompu son contrat avec l'agence
« Je trouve que Balenciaga a bien réagi. Ils se sont excusés et nous ont envoyé des fleurs », a déclaré à l'AFP Anna Vivchar. Avec jusqu'à 13 castings par jour, « on n'attend normalement environ qu'une demi-heure », a raconté la jeune mannequin ukrainienne Elizabeth Pentsarska (17 ans), qui a déjà défilé pour Chanel.

Dans ce monde feutré, où les mannequins craignent de se plaindre par peur de perdre leur travail, la rupture du contrat a fait du bruit. Pour Isabelle Saint-Félix, secrétaire générale du Syndicat national des agences de mannequins (Synam), cette sanction sonne comme un « avertissement ».

« Le groupe Kering a pris une bonne décision et cela peut être l'occasion de redresser un peu la situation », qui s'est « détériorée depuis quatre-cinq ans », a ajouté la responsable. Ce syndicat affirme avoir alerté sur ce sujet la Fédération de la couture depuis plusieurs années. « Il faut que les choses changent », lance Isabelle de Saint-Félix.

Les mannequins « ont une carrière courte, elles sont là pour travailler, et se disent que c'est peut-être le prix à payer », remarque-t-elle. Pour Sara Ziff, ancienne top modèle à la tête de Model Alliance, association new-yorkaise pour la défense des droits des mannequins, « l'industrie de la mode est incapable d'autorégulation ».

Cette association, dont James Scully est membre, milite par ailleurs pour une règlementation du travail des mannequins mineurs. Sara Ziff, connue pour son documentaire Picture Me sur les coulisses de la mode, s'interroge aussi sur les agents de ces jeunes filles. « Ne sont-ils pas censés s'occuper de leurs intérêts ? Je pense que c'est ça, la vraie histoire. »

Pour elle, les inquiétudes des mannequins sont trop souvent « banalisées, ignorées ». Cette profession « est souvent plus vue comme un privilège que comme un véritable travail. Mais quand on voit ce qui se passe en coulisses, ce n'est pas glamour du tout ».

« On passe sa vie entre New York, Londres, Milan et Paris pendant plusieurs mois en travaillant 24h/24. Et souvent, on ne connaît pas son emploi du temps plus de quelques heures à l'avance », raconte-t-elle, ajoutant toutefois que les conditions de travail ont tendance à être meilleures en France qu'aux Etats-Unis.

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