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9 avr. 2014
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Alexis Botaya (Soon Soon Soon) : «quand une tendance naît, son opposé naît aussitôt"

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9 avr. 2014

NellyRodi et OpinionWay viennent d'entrer au capital de Soon Soon Soon, plateforme de détection d’innovations lifestyle tous secteurs, avec conseil aux entreprises B to C, comme l'annonçait hier FashionMag Premium. Alexis Botaya, le cofondateur de cette agence d’un genre nouveau. explique la méthodologie unique, «scientifique», qui invite les marques à imaginer le futur.

FashionMag: Qu’est-ce que Soon Soon Soon ?
Alexis Botaya: Soon Soon Soon est né il y a deux ans et demi. Il s’agit d’une plateforme de détections d’innnovations crowdsourcées. Ce à quoi nous nous intéressons, c’est l’innovation lifestyle. Comment les gens vivent aujourd’hui, comment vivront-ils demain, et en quoi cela impacte leur mode de vie au quotidien ? Et ce, dans les domaines de la nourriture, la mode, le design, la maison, ou le business. Soon Soon Soon a trois dimensions : soonsoonsoon.com, un magazine online accessible à tous, une communauté d’éclaireurs qui détectent les innovations à travers le monde et un service pour les marques et les entreprises. À l’origine de ce concept, nous sommes cinq associés dont deux principaux : Ganaël Bascoul et moi-même.

Ganaël Bascoul et Alexis Botaya.


FM: En quoi vous différenciez-vous des agences de tendances historiques ? 

AB: Ce qui fait notre différence, c’est le crowdsourcing. Nous nous appuyons sur une méthodologie data, avec près de 800 éclaireurs dans 15 pays : en France, Amérique latine, Chine, Afrique du Nord, aux États-Unis et dans le reste de l’Amérique du Nord... Ces informateurs font remonter des signaux faibles, que nous qualifions dans une base de données en fonction de paramètres. Nous suivons sur des graphiques l’évolution des valeurs à travers ces innovations. (Chaque trimestre, nous publions une analyse barométrique des valeurs émergentes, le Soonoscope). À ma connaissance, les agences traditionnelles ne disposent pas de ce système. Nous prenons le meilleur des deux mondes entre l’institut de sondage avec l’aspect data et l’agence de tendance pour l’aspect inspirationnel !

FM: Justement, vous annoncez l’ouverture de votre capital à NellyRodi et OpinionWay. Pourquoi ce choix stratégique ?
AB: Pour aller plus vite. Nous sommes de plus en plus sollicités pour des études quanti, des sondages ainsi que du conseil sur la stratégie de marque et le développement produit. Nous répondions à cette demande mais pas assez rapidement. Il nous fallait des partenaires. L’alliance avec l’agence de tendances NellyRodi d’un côté, et l’institut de sondage OpinionWay de l’autre, va nous permettre de pouvoir être pertinents sur l’ensemble du cycle d’innovation : commencer avec des insights créatifs et des innovations, passer à l’étude quanti ou quali puis dérouler la stratégie d’entreprise de façon opérationnelle. C’est très fort car, en France, cela n’existe pas encore.

FM: Chaque trimestre, vous publiez le Soonoscope acheté par les dirigeants d’entreprises, les planneurs stratégiques. De quoi s’agit-il ?
AB: Le Soonoscope est une étude trimestrielle thématisée de 120 pages, dans laquelle nous étudions les valeurs émergentes qui s’expriment à travers les innovations dans le monde. Nous nous intéressons à ce que font les créateurs et, pour cela, nous nous appuyons sur les détections de nos éclaireurs, et étudions également un certain nombre d’articles de presse lifestyle international que l’on échantillonne au hasard. En screenant ces valeurs, on obtient des mappings d’expression des valeurs émergentes. Nous les analysons avec des sociologues. Pour travailler, nous utilisons une grille de psychologie sociale de valeurs établie selon la méthodologie de Shalom Schwartz, psycho-sociologue des années 80 dont les travaux ont été actualisés par une recherche française en 2008.

FM : Quel background personnel vous a amené à développer cette méthode d’approche du monde sociétal ?
AB : Ganaël Bascoul, 33 ans, vient d’un des gros cabinets de conseil, où il travaillait beaucoup en innovation et développement durable. Il a été professeur à l’ESCP. Moi, j’ai 34 ans, je suis ingénieur et je travaillais pour un conseiller d’État sur des problématiques de développement durable et évolution des modes de consommation. Ensuite j’ai été journaliste au Canada. Quand nous nous sommes rencontrés, notre idée de départ était de valoriser les idées de créateurs que l’on trouvait positives pour le monde de demain et de leur donner une vitrine sur un site internet. De fil en aiguille, nous nous sommes aperçus qu’il y avait plein d’autres projets à mener.

Le 7e Soonoscope vient de sortir. La thématique : Crowdsourcing, crowdfunding, comment les nouvelles pratiques de crowd influent le monde économique et les nouveaux styles de vie ?



FM : Quel service sur mesure apportez-vous aux marques ?

AB : Nous travaillons pour des grands comptes : assurances, équipementiers automobiles, téléphonie mobile... Beaucoup de marques sont arrivées au bout d’un cycle d’innovation et sont engagées dans une réflexion sur les valeurs de demain et leur plateforme de marque. Nous travaillons sur ces problématiques avec l’outil Soonoscope, sur mesure. D’autres sont intéressées par la dimension créative : nourrir leurs équipes de créativité mais également entrer dans un cycle de créativité pour développer de nouveaux produits ou développer de nouveaux services ou une nouvelle offre. Nous leur apportons des insights créatifs en réalisant des publications appelées Soonoshots sur leur promesse de marque par exemple. Il s’agit de contenus exclusifs.

FM : Comment mobilisez-vous votre communauté d’informateurs et la fidélisez-vous ?

AB : Nous n’avons pas des yeux et des oreilles partout, il nous fallait donc une communauté d’éclaireurs. Nous leur demandons de détecter l’information, puis nous nous chargeons de traiter ces informations. On a également un niveau expert, où des éclaireurs spécialistes sont associés à des réunions sur une thématique, l’habitat du futur par exemple. Au delà de ça nous organisons des événements très réguliers avec des partenaires pour nos éclaireurs : récemment par exemple chez Kiss Kiss Bank Bank, chez Google, et bientôt avec Carrotmob ! L’idée est de sortir des rencontres virtuelles de se rencontrer dans le réel, de tester des innovations, de créer une sorte de lieu de rendez-vous sur l’innovation à Paris qui n’existait pas encore.

FM: Quel regard portez-vous aujourd’hui sur les tendances ?

AB: Les cycles d’innovation sont toujours plus courts, les choses vont vite. Ce qu’on remarque c’est que, quand une tendance naît, son opposé naît aussitôt ! Par exemple, l’ultra connexion naît avec la déconnexion, et elles fonctionnent ensemble. Un opérateur de téléphonie mobile a développé une application pour se déconnecter ! C’est exactement le même principe pour la lenteur. Le slow vient contrecarrer la tendance du toujours plus vite, toujours plus rapide. Des tendances soeurs naissent et évoluent en parallèle. Ainsi, la consommation collaborative ne va jamais remplacer la consommation individuelle.

FM: Quelles sont les principales innovations en matière de mode?

AB: Deux tendances fortes, et sinon déjà là, vont débarquer : le Wearable Tech, les technologies embarquées dans les vêtements, et les vêtements communicants. Beaucoup de vêtements servent de capteur : capteur de pollution ou capteur d’effort, ce qu’on appelle le Quantified Self, mesurer les paramètres vitaux de l’individu et de son environnement pour lui permettre d’optimiser au mieux son mode de vie. Cela, les vêtements le permettent facilement.

FM : Quels sont maintenant vos objectifs de développement ?

AB : Nous sommes en train de traduire le site en anglais. L’ouverture au monde anglophone est un enjeu très important car on a de vrais concurrents sur ce terrain. Nous avons également envoyé quelqu’un à Montréal pour toucher le marché francophone canadien, nous avons noué une gros partenariat avec une agence sur place. Enfin, nous sommes en train de tourner des pilotes vidéo avec une agence de production pour tester des innovations. Nous allons ensuite chercher des partenaires pour les diffuser. Et bien sûr, nous souhaitons encore faire grossir la communauté des éclaireurs. Nous essayons de la développer en Russie, en Australie, en Afrique...

Par Noélie Viallet

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