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Amazon Europe débouté par le Conseil constitutionnel

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6 oct. 2022

Dans le conflit judiciaire qui l'oppose aux grands acteurs de la distribution réunis dans l'Ilec (Institut de liaisons des entreprises de consommation), le groupe Amazon avait adressé au Conseil constitutionnel une question prioritaire de constitutionnalité (dite QPC). Ce 6 octobre, le Conseil a débouté Amazon de ces demandes, et attiré du même coup l'attention sur ce conflit entre grands commerçants.


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La démarche entamée auprès des sages s'inscrit dans le cadre de la procédure engagée auprès du Tribunal de Paris par l'Ilec, qui réclame cinq millions d'euros à Amazon et la cessation d'une partie de ses pratiques commerciales, dont des clauses jugées abusives et pénalités qualifiées d'exorbitantes imposées aux fournisseurs de la plateforme. Pour rappel, ce même tribunal avait déjà condamné Amazon en 2019 à quatre millions d'euros d'amende pour clauses "manifestement déséquilibrées".

Plus précisément, la démarche d'Amazon s'appuie sur une portion du Code du Commerce, dont l'américain a entrepris le 7 juillet dernier de contester la légalité auprès du Conseil constitutionnel, en vu de remettre en cause le fondement juridique de la démarche de l'Ilec.

Si le conflit entre Amazon et les distributeurs tricolores était jusque-là resté très discret, il apparait aujourd'hui au grand jour via la publication du jugement rendu par le Conseil constitutionnel (consultable sur le portail de l'institution). Les Sages du Palais Royal (Paris Ie) estiment conforme à la constitution l'article L. 442-1 du code de commerce, dans sa rédaction résultant de l'ordonnance n° 2019-359 du 24 avril 2019.

"Liberté d'entreprendre" et responsabilité des distributeurs



Cet article (consultable ici) porte sur la responsabilité des acteurs de production, distribution ou service dans le cadre de négociation commerciale, ou conclusion d'un contrat. Ceux-ci doivent réparer les préjudices causés s'ils réclament à l'autre parti "un avantage ne correspondant à aucune contrepartie" ou disproportionné par rapport à la contrepartie. Il en va de même s'ils soumettent (ou tentent de soumettre) à des obligations "créant des déséquilibres significatifs dans droits et obligations des parties".

Selon le rendu des Sages, Amazon aurait notamment tenté de faire valoir que ce texte méconnaît "la liberté contractuelle et la liberté d'entreprendre". Et a tenté de le faire invalider au motif que le seuil de "disproportion" n'est pas précisé. Un problème d'intelligibilité, estime Amazon, qui accuse par conséquence le texte de loi de méconnaitre le principe de légalité des délits et peines.

Dans sa réponse, le Conseil constitutionnel pointe lui que le législateur a toute latitude pour limiter la liberté d'entreprise, du moment qu'il n'en résulte pas des atteintes disproportionnées à celle-ci au regard de l'objectif poursuivi. Or les Sages estiment que cet article poursuit un objectif d'intérêt général, car pensé pour "préserver l'ordre public économique, réprimer certaines pratiques restrictives de concurrence et assurer un équilibre des relations commerciales".


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Quant à la notion de "disproportion" jugée trop vague par Amazon, le Conseil estime qu'elle ne présente pas de caractère imprécis ou équivoque. " Dès lors, le grief tiré de la méconnaissance du principe de légalité des délits et des peines doit être écarté" tranchent les sages, qui rejettent ainsi l'ensemble des arguments avancés par Amazon Europe dans cette affaire.

Comme mentionné, cette QPC n'était pas l'oeuvre d'Amazon France, mais d'Amazon Europe. Reste donc à savoir si le groupe américain tentera désormais un recours, sous une forme ou un autre, au niveau européen.

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