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15 oct. 2019
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Designers Apartment accueille Alphonse Maitrepierre, Mossi, Gamut et Egon Lab

Publié le
15 oct. 2019

La dernière cuvée de Designers Apartment, qui s'est déroulé fin septembre au Palais de Tokyo en marge de la Fashion Week, a offert une vision intéressante de la jeune création parisienne. L’incubateur-showroom, opéré tout au long de l'année par la Fédération de la Haute Couture et de la mode et soutenu par le Défi, a dévoilé les collections de treize marques émergentes, dont quatre nouveaux entrants à découvrir au plus vite : Alphonse Maitrepierre, Egon Lab, Mossi et Gamut, offrant des styles bien différents, entre esprit couture et un parti pris plus urbain.


Une silhouette d'Alphonse Maitrepierre - Instagram @alice.pallot


Alphonse Maitrepierre, une couture contemporaine

A 24 ans, Alphonse Maitrepierre a une idée très claire de sa vision de la mode. Passionné de couture, curieux de tout, ouvert aux collaborations artistiques, ce touche-à-tout, qui a aussi flirté avec le cinéma comme acteur et costumier, a officiellement lancé la marque de prêt-à-porter qui porte son nom fin 2018. Mais il crée des vêtements depuis déjà trois ans.

Originaire de Montpellier, le jeune homme sort diplômé de La Cambre (Bruxelles) en 2016. Après un stage chez Jean Paul Gaultier où il rencontre Samudra Hartanto, le bras droit du couturier, devenu son mentor, il cumule les jobs (expérience en muséographie, assistant styliste chez Acné, consultant digital chez le publicitaire BETC pour Chanel, freelance pour Neith Nyer, etc.) pour financer son projet.

Sa collection exalte les codes de la couture en les traduisant dans une vision digitale contemporaine. Ainsi des robes en tulle brodées de sequins sont imprimées d'images numériques pour un effet pixelisé. Le sac Kelly repris en Photoshop est étiré à l'extrême pour se transformer en manette de console. Un t-shirt s'esquisse discrètement sur une robe en organza transparent, qui laisse voir une culotte sur laquelle s'imprime une coquine patte de félin griffue… Sur une combinaison en tulle se dessinent les coutures typiques de la lingerie et corseterie.


Alphonse Maitrepierre - ph Dominique Muret

 
Une robe en satin rose reprend le geste des anciens couturiers en train de draper sur leur cliente, en enroulant en spirale le tissu autour du corps, retenu ensuite par de menus boutons. Avec une belle maîtrise de la construction, le jeune créateur bouillonnant propose des vêtements à usages multiples, comme une double chemise (cape pour l'extérieur et chemise), une jupe qui peut être portée en robe-combinaison à bretelles fines, ou le tailleur qui devient caraco. Des vêtements sophistiqués mais portables, qui ont du caractère et sont entièrement dessinés et fabriqués à Paris.
 
Installé sur la butte Montmartre, ce Parisien d’adoption est parvenu à drainer autour de lui toute une communauté d’artisans et artistes, dont Alice Watier pour la fabrication de ses sacs et pièces en cuir, Sébastien Saraïva pour la maille, Sara Vercheval pour les graphismes et les imprimés, le Studio L’Etiquette, Marthe Sobczak, Alexandre Carril et Alice Pallot pour les images et vidéos. Il est actuellement commercialisé au sein de quelques boutiques aux Etats-Unis.

Mossi, l’art de la construction

Même passion pour la couture chez Mossi Traoré, qui a relancé en 2018 sa marque de prêt-à-porter féminin aux lignes épurées mêlant art, mode et artisanat. Le designer de 36 ans est né à Paris et a grandi en banlieue, dans les tours de la cité des Hautes-Noues à Villiers-sur-Marne. Issu d’un milieu modeste avec un père éboueur et une mère femme de ménage, il travaille chez Zara, puis chez Armani, comme vendeur pour payer ses études à l’école parisienne Mod’Art International.
 

Un look signé Mossi - DR


Cet admirateur d’Issey Miyake, de Yohji Yamamoto et de Margiela lance en 2011 la marque Zhen & Mossi avec Wei Zhen, une amie chinoise rencontrée à l'école. Mais malgré les premiers succès, il devra mettre fin à l’aventure faute de ressources. Cela ne l’empêche pas de se remettre en jeu en créant en 2015 les Ateliers Alix, une école de mode privée proposant un programme de formation Haute Couture pendant un an et des workshops dans différents métiers avec des artisans.
 
Partant de là, le créateur se relance dans le prêt-à-porter avec un nouveau projet de mode : Mossi. Ce label créé en 2018 est « pensé dans un esprit d’intégration et surtout de partage d’élégance raisonnable, qui se nourrit de collaborations artistiques et de savoir-faire artisanal. Un prix juste pour une mode 100 % made in France », ses collections étant produites en banlieue et dans des ateliers parisiens, en particulier aux Ateliers Alix. Il a intégré cette année dans son équipe une business developer, qui devrait l’aider à se faire connaître davantage.
 

Mossi Traoré - DR

 
La rigueur et l’esthétisme couture caractérisent ses silhouettes épurées noires ou blanches aux constructions impeccables, qui jouent sur asymétries, drapés et plissés. Une chemise se transforme en veste. Un manteau en trompe-l’œil se cache derrière une chemise plissée superposée à une jupe drapée. Les matières impalpables comme mousseline, organza, tulle, acétate ajoutent à la légèreté poétique de l’ensemble. Le créateur introduit cette saison de la couleur à travers deux jupes en tulle jaune et bleu qui se superposent.

Gamut, une esthétique du collage

Créée en décembre 2017, la marque de prêt-à-porter parisienne, qui a défilé pour la première fois en septembre 2018 à Paris, avance ses pions. Elle compte un revendeur à Tokyo et lors du showroom de Designers Apartment, elle a séduit notamment un multimarque chinois. Elle a mis l’accent aussi sur les accessoires cette saison en développant des « bijoux de chaussures » très appréciés, en métallerie recyclée, des sacs et des chapeaux, dont une capeline intégrée dans une casquette qui a bien plu aux acheteurs
 
Gamut joue avec les constructions, les coupes, les codes et les détails, dans un travail collectif où les points de vue se croisent entre masculin et féminin, sportswear et couture pour trouver une synthèse idéale. Derrière la marque se cachent, en effet, six jeunes designers français, trois filles et trois garçons auxquels s’est ajoutée une photographe à la direction visuelle, tous passés par l’école de Bruxelles La Cambre. Comme dans un kaléidoscope, les vêtements se déconstruisent pour mieux se réinventer. 

Un détail dans un look pour l'été 2020 - Gamut


De par son approche totalement collective, spontanée et partagée, la marque propose un large éventail de styles un peu à la manière d’une esthétique du collage. Dans la collection pour le printemps-été 2020, une veste artisanale côtoie ainsi une veste techno, un pantalon d’homme est désossé, une robe 1930 est coupée en biais, broderie et peinture s’invitent sur les vêtements, le corps nu de la drag queen Messalina Mescalina semble multiplier les pirouettes sur une longue robe blanche.
 
Egon Lab, la touche rebelle

Fondée en janvier 2019, la marque de Florentin Glémarec (24 ans) et de Kevin Nompeix (26 ans) propose un vestiaire masculin, qui s’adresse aussi à la femme, aux influences streetwear. Trenchs et costumes côtoient chemisettes et sweat-shirts dans un esprit un brin rebelle, où l’on retrouve notamment le tartan rouge caractéristique du mouvement punk dans des capuches à lacets, mais aussi dans des costumes, où l’imprimé écossais fusionne dans un fond noir.
 

Florentin Glémarec (à gauche) etKevin Nompeix - Egon Lab


Ailleurs, le costume ou le manteau sont taillés dans une toile de Jouy, un trench est zébré par une série de gribouillages tagués à la main, repris dans une chemise en organza transparente, tandis que le thème bandana s’incruste sur les épaules et le col d’une chemise blanche.

« Notre identité est centrée autour de l’idée d’anticonformisme. Nous voulons créé l’uniforme de notre génération à partir de pièces basiques et faciles à porter, tout en étant spéciales », résument les deux compères, qui sont à la fois dirigeants et directeurs créatifs de leur marque.
 
Après des études en sémiologie de la mode à l’école Ecran de Bordeaux et quelques jobs dans la communication, Kevin est monté à Paris, où il est devenu agent de mannequins pour Success Models. C’est là qu’il a rencontré Florentin Glémarec, à l’époque à la tête du label Icosae avec son frère aîné Valentin.


La marque se veut anticonformiste - Egon Lab


« J’ai laissé Icosae il y a trois saisons, car je n’étais pas d’accord sur la direction artistique », nous explique ce dernier qui, après un passage à l'Atelier Chardon Savard, a plongé dans le bain en créant ce premier label avec son frère en 2014, tout en devenant mannequin. Activité qu’il a poursuivi, tout comme les collaborations en tant que styliste indépendant, se consacrant au nouveau projet d’Egon Lab.

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