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Gilets jaunes : le soutien aux commerces se fait attendre

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3 déc. 2018

Le ministre de l'Economie, Bruno le Maire, convoquait à Bercy lundi 3 décembre à 8h15 les représentants des différentes fédérations du commerce, dont le Conseil du Commerce de France et l'Alliance du Commerce (enseignes d’habillement et grands magasins), ainsi que le Medef et Bpifrance. Un tour de table identique à celui ayant une semaine plus tôt abouti à l'annonce de six mesures visant à aider les commerçants touchés par des pertes liées à la mobilisation des gilets jaunes. Des mesures qui, dans les faits, tardent à prendre forme.


Bruno Le Maire, entouré des secrétaires d'Etat Agnès Pannier-Runacher et Jean-Baptiste Lemoyne, lundi 3 décembre - Matthieu Guinebault/FNW


« Le problème, c’est que beaucoup de préfectures n’avaient toujours pas reçu la circulaire du ministre et ne savaient comment agir », nous explique Yohann Petiot, président de l’Alliance du Commerce, qui regroupe enseignes d’habillement et grands magasins. En effet, si Bruno Le Maire annonçait dès le lundi 26 novembre demander aux préfets de faciliter l’ouverture des commerces le dimanche, il aura fallu attendre le jeudi 29 novembre au soir pour que la circulaire soit communiquée aux préfectures. De quoi agacer bon nombre de commerçants et instances représentatives, qui n’hésitent plus à confier leurs doutes sur le fait que le ministère ait saisi l’urgence du calendrier, en pleine période des achats de fin d’année. Une critique qui porte en premier chef sur les autorisations d’ouverture dominicale « au cas par cas », précédemment évoquées.

« Un besoin de simplification est exprimé par certains commerçants sur ces ouvertures qui doivent être sectorielles et non pas au cas par cas. Nous apporterons toutes les précisions par l’intermédiaire des préfets », a confirmé Bruno Le Maire lundi 3 décembre à l’issue de sa rencontre avec les professionnels. Une conférence de presse qui a surtout été l’occasion pour le ministre d’exprimer sa position individuelle sur le conflit social, apportant en revanche assez peu d'annonces nouvelles, si ce n’est la mise en place de délais de paiement ou remise de pénalités sur les acomptes d’impôt sur les sociétés (IS) et la cotisation foncière des entreprises (CFU), exigible au 15 décembre. Ce dernier point était en effet un sujet d'inquiétude fréquemment exprimé depuis 10 jours.

Mais l'impatience reste palpable du côté des commerçants. « Ce que l’on demande, c’est de pouvoir faire la période de fin d’année avec pourquoi pas des ouvertures en plus le dimanche dans les territoires où c’est possible, résume Yohann Petiot. Mais cela impose que les préfectures soient très réactives. Nous les avons toutes contactées la semaine passée et seule la Loire-Atlantique, la Loire et l’Aube nous ont répondu. Là où d'autres nous ont réclamé parfois la liste exacte des commerces souhaitant ouvrir. Autant dire que c’est impossible : les plus petites structures n’ont ni le temps ni les moyens pour ces démarches. Or, il faut que les préfectures lancent dès maintenant les autorisations pour que cela se fasse dès dimanche prochain. Car, après, il sera trop tard, les autres dimanches de décembre sont dans la majorité des cas déjà ouverts et ne rattraperont en rien les dégâts. »

Des mesures « anti-douleurs »

Outre une largesse accordée aux commerces en termes d’ouverture le dimanche, Bercy annonçait il y a une semaine l’accélération des indemnisations pour pertes d’exploitation par les assurances et la mise en place de facilités auprès des banques pour les dépassements de découvert. Les entreprises devraient également profiter des baisses de charges initialement attendues en janvier en remplacement du CICE, Crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi. Et Bpifrance aménagera l’étalonnement des remboursements pour les structures les plus exposées aux contrecoups d’activité.


Bruno Le Maire durant la rencontre du 3 décembre avec les représentants du commerce et du patronat - Bercy


Mais, outre l’ouverture dominicale, c’est bien la facilitation du chômage partiel qui pourrait être très largement mise à profit par le commerce. L’Alliance du Commerce indique que tous les renforts de personnel, traditionnellement menés par les enseignes pour la période des fêtes, ont été purement et simplement annulés. « Et les enseignes sont désormais nombreuses à réfléchir à la mise en place du chômage partiel pour cette fin d’année » prévient l’organisme professionnel, rappelant que les enseignes d’habillement/chaussure, grands magasins et magasins populaires totalisent 180 000 salariés dans 26 000 points de vente. Des réseaux qui auraient connu pour certains des dégâts irréparables dans leur activité.

Pour Yohann Petiot, « comme les dérogations pour ouvrir le dimanche, la mesure touchant au chômage partiel demande de la pédagogie ». « Il faut de la facilité administrative, que les demandes soient plus souples et faciles à mener pour les entreprises afin que ces mesures puissent être mises en œuvre de manière rapide pour celles qui en ont besoin ». Une solution de dernier recours brandie à l’heure où aucune fédération ne veut miser sur un délitement du mouvement des gilets jaunes, qui appelle à une nouvelle mobilisation la semaine prochaine.

Le Conseil du Commerce de France, via son président William Koeberlé, a réclamé lundi que les mesures annoncées une semaine plus tôt soient enfin détaillées sur le site du Ministère. Ce qui a finalement été chose faite le 4 décembre.

« Ce sont des anti-douleurs, mais demain il faudra traiter la maladie », commentait de son côté il y a quelques jours Bernard Morvan, président de la Fédération Nationale de l’Habillement, reprenant les termes de François Asselin (Confédération des PME) a propos des mesures annoncées par Bercy. Car le représentant des petits détaillants insiste sur un point : « Les gilets jaunes, ce sont nos clients ! Et la France qui souffre, c’est aussi le commerce indépendant qui souffre en silence ». Des petites structures qui, plus encore que les magasins d’enseignes, seront en effet exposées à la complexité administrative entourant encore pour l’heure les aides annoncées par Bercy.

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