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5 janv. 2005
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L'industrie française du textile condamnée à être toujours plus créative

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5 janv. 2005

3 questions à Guillaume Sarkozy, président de l'UIT.
L'invasion redoutée de produits textiles chinois, avec la fin des quotas sur les importations le 1er janvier prochain, va obliger l'industrie française déjà recentrée sur le haut de gamme et sur des marchés de niche, à miser encore davantage sur sa créativité. Depuis plus de vingt ans, les importations de textile n'ont cessé de croître, passant de 3,543 milliards d'euros en 1980 à 11,895 mds en 2003, tandis que les exportations se sont accrues dans une moindre mesure de 2,99 mds à 8,837 mds, selon des statistiques de l'Union des industries textiles (UIT). Aujourd'hui, un article textile confectionné et un vêtement sur deux consommé en France provient de pays hors UE. Seuls 40% de la production française alimente le marché français, contre 55% il y a dix ans. "Sur dix ans, nous avons perdu quatre points de la balance commerciale. Malgré la croissance forte des exportations, notre commerce extérieur s'est légèrement plus déséquilibré", explique Thierry Noblot, délégué général de l'UIT. "La France risque de souffrir davantage car elle est très orientée vers l'intra-européen au détriment du reste du monde", résume Danièle Clutier, directrice de recherche à l'Institut français de la mode (IFM). "Dans la mesure où les importations vont entrer plus facilement sur l'espace intra européen, la France va subir une concurrence encore plus forte et perdre des parts de marché", dit-elle. L'IFM estime que le démantèlement des quotas doit se traduire par un accroissement significatif des importations dans l'Union, qui induira à son tour une aggravation de la baisse de la production et de l'emploi industriel de l'ordre de -3% supplémentaire pour le textile et de -9% pour l'habillement. Pour Lucien Deveaux, patron de l'entreprise du même nom qui produit des textiles unis, imprimés ainsi que des textiles spéciaux comme l'éponge, les quotas sont un faux problème car ceux-ci étaient "dévoyés". "Quand les quotas sur la France étaient terminés, ils passaient par la Belgique, les Pays-Bas ou d'autres pays", relève-t-il. "Ils étaient dévoyés aussi par les matières, lorsque l'on manquait de tee-shirts, on appelait cela des chemises sans col, quand on manquait de chemises on appelait cela des tee-shirts avec col..." En revanche, "le vrai problème, c'est que cela va nous obliger à accélérer notre créativité", insiste-t-il. "Nous ne pourrons définitivement pas concurrencer les Chinois sur les basiques comme le tee-shirt blanc, en raison des prix". Pour résister, le secteur devra créer, innover toujours davantage, faire preuve de réactivité, de proximité au sein de la zone paneuro-méditerranéenne pour permettre le réapprovisionnement permanent et développer des produits de plus en plus élaborés en terme de valeur ajoutée. "La mode doit être livrée toujours plus vite pour ne pas être démodée par le temps et la copie, or la Chine peut sur son marché intérieur et sur des marchés de proximité copier indument l'ensemble de nos créations, déplore-t-il. Et de relever que son entreprise est déjà contrainte de consacrer 50% de sa masse salariale en recherche et développement pour maintenir son niveau de créativité. "Aujourd'hui, nous sortons 5.000 dessins par an, soit 20 par jour quand autrefois 2 à 300 dessins annuels paraissaient déjà énormes"!, dit-il. L'inquiétude est d'autant plus forte que les industriels subissent la dépréciation du dollar par rapport à l'euro. "Fin des quotas et euro fort, la conjonction des deux est le pire scénario qui pouvait nous arriver", insiste Thierry Noblot.

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