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21 janv. 2014
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La Vallée Village: un jugement de la cour d'appel requalifie le contrat de prestation de services de Value Retail en bail commercial

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21 janv. 2014

C’est une sorte de bombe qui vient de toucher le centre de village de marques La Vallée Village de Serris, près de Disneyland Paris.

La cour d’appel de Paris dans un jugement du 14 janvier dernier, vient de remettre en cause dans le cadre d’une action judiciaire de la marque de prêt-à-porter Nitya le contrat de prestations de services utilisé par le gestionnaire en le requalifiant en bail commercial.

Depuis son ouverture et comme cela se pratique dans les centres du promoteur Value Retail, les marques et enseignes se voient proposer un contrat de prestations de services qui ne lient donc pas la présence d’un locataire à la propriété d’un bail. Cela a pour conséquence pour le gestionnaire de pouvoir se séparer d’une marque s’il le souhaite. Mais aussi donne la possibilité à une marque de n’occuper un espace qu’un "certain temps" sans alourdir financièrement son installation dans le centre. C’est un élément clé de la stratégie de Value Retail dans la mesure où elle permet de renouveler régulièrement l’offre de marques.

La Vallée Village (visuel Value Retail)


Bien sûr, selon nos informations, le conflit surgit entre La Vallée Village et la marque de prêt-à-porter Nitya n’est pas le premier que le centre connaît. Mais à chaque fois jusqu’à présent, il se serait réglé par un départ négocié.

Cette fois, la marque a porté le conflit en justice.

L’affaire a commencé par le passage devant un tribunal arbitral qui a dit prescrite l’action de la société Nitya tendant à faire requalifier le contrat de prestation de services réciproques en bail commercial.

S’en est suivi un certain nombre de condamnations de celle-ci dont une indemnité d’occupation de plus de 126 000 euros pour la période de janvier à juillet 2012 ainsi qu’une astreinte contractuelle pour les mêmes mois portant sur un total de près de 300 000 euros. De plus, il était précisé que Nitya devait quitter les lieux sous astreinte de 10 000 euros par jour de retard.

Nitya a contesté la décision et demandé l’annulation des sentences arbitrales. La cour d'appel lors d’une décision datée du 29 octobre 2013, lui a donné raison.

La marque de prêt-à-porter avait été conduite à prendre comme arbitre Michel Pazoumian, le président de Procos. Nitya affirme en effet ne pas avoir eu vraiment le choix de son arbitre. Or, elle a relevé que celui-ci n’était pas en position d’indépendance car lié professionnellement à Maître Gilles Hittinger-Roux, avocat régulier de Procos… Et un des conseils du gestionnaire de La Vallée Village !

C’était assez pour que la cour d’appel annule la sentence arbitrale… Et donc conduise à revoir le sujet.

C’est ce qui a été fait par l’arrêt du 14 janvier dernier.

Et il pourrait se définir comme un séisme pour le promoteur-gestionnaire ainsi rattrapé par le droit français.

En clair la cour d’appel considère que "le contrat conclu entre Nitya et Value Retail remplit les conditions d’application du statut des baux commerciaux".

Pour la cour, il n’y a pas de doute que le contrat liant les deux parties est bien équivalent à un bail commercial dans la mesure où Nitya louait "des locaux stables et permanents dans lesquels est exploité un fonds de commerce se caractérisant par l’existence d’une clientèle propre au commerçant". La cour relève aussi que l’enseigne assume seule les risques de son exploitation, disposant de son propre personnel, bénéficiant d’un service de caisse et payant ses charges (électricité, assurances, etc.), etc.

La cour d’appel estime donc que Value Retail aurait dû verser une indemnité d’éviction à Nitya. Elle a désigné un expert avec pour mission de déterminer le montant de cette indemnité d’éviction. Nitya la chiffre à plus de 2,5 millions d’euros !

Le risque pour le promoteur de centres de marques est que des demandes en cascade surgissent. Contacté, Value Retail n’a pas souhaité commenter.

Le délégué général du conseil national des centres commerciaux, Jean-Michel Silberstein, affirme de son côté ne pas avoir été surpris par l’arrêt de la cour d’appel, tant il est conforme au droit français. Et même si cela concerne la formule gagnante qu’est La Vallée Village.

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