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Marguerite Capelle
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25 janv. 2022
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La haute couture communautaire et créative de Christian Dior

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Marguerite Capelle
Publié le
25 janv. 2022

Démonstration collective chez Christian Dior ce lundi, avec une collection sobre et sombre de haute couture internationale, mettant à l’honneur l’effort collectif plutôt que la vision personnelle de la créatrice.
 

 


La clé de cette collection, c’était donc la mode symphonique dont seule est capable un grand atelier de haute couture, et les vêtements étaient tout en proportions harmonieuses et expérimentations subtiles.

« Je pense que trop de gens croient que la mode et même la haute couture sont le fait d’un couturier seul, et du chef d’atelier : les deux réalisent leur vision, et c’est tout. En particulier maintenant, pendant cette pandémie. Mais la haute couture, c’est une immense aventure collective, celle de centaines de personnes talentueuses qui travaillent dur pour réaliser quelque chose de nouveau et d’unique », soulignait Maria Grazia Chiuri lors d’une avant-première dimanche, dans son atelier au bord de la Seine.

Dès l’ouverture, la pureté des lignes domine dans cette collection couture printemps-été 2022 : du top en résille d’organza brillamment décoré de motifs noirs, à la jupe volumineuse et au manteau en sergé de laine noire de bandit de grand chemin. Mais c’était aussi un Dior chic et sport, avec des combinaisons patchwork dans des tons noir et argent, encore une fois rebrodées main à la perfection. Le genre de savoir-faire qu’on ne voit que sur les podiums parisiens.

Le manteau trapèze longueur mi-cuisse en laine écru de Maria Grazzia Chiuri, agrémenté d’une tapisserie de tresses, éclats et cordelettes couleur argent, atteignait la perfection, associé intelligemment à un collant résille incrusté de perles et une nouvelle chaussure couture ultra chic : un escarpin recouverts de perles, de rocailles, de losanges noirs et de mèches grises, le tout cousu avec dextérité.


Christian Dior - Spring-Summer2022 - Haute Couture - Paris - © PixelFormula



La couturière déclinait tout au long du défilé une palette extrêmement restreinte et concentrée d’écru, lamé argenté, or passé et bien sûr, gris colombe Dior.

Le défilé montait crescendo jusqu’aux tenues de soirées, des robes trapèze en crêpe spongieux, aux coupes dos nu, des robes en tulle avec des cascades de plis dans de nombreuses teintes lumineuses de gris, et une volumineuse robe de mère supérieure avec poches de côté. Tout était classieux et très dame.

Juxtaposition frappante : Maria Grazia Chiuri a engagé deux brillants artistes indiens, Manu Parekh et Madhvi Parekh, pour créer des œuvres audacieuses et graphiques à partir de la culture indienne, en se concentrant notamment sur les nombreux dieux de ce pays, la vie villageoise, le mysticisme et par dessus tout, la déesse Kali.

Ces tableaux ont ensuite été transformés en tapisseries massives de trois mètre sur cinq, brodées sur sur du coton bio et produites par les étudiantes et diplômés de la Chanakya School of Craft, à Bombay. Le tout offrait un superbe décor pour le défilé.

« C’est un véritable honneur pour notre équipe de travailler avec une maison aussi prestigieuse que Dior. Surtout que cette grande maison parisienne a choisi un duo de formidables artistes indiens contemporains. Tout le pays est fier », expliquait Karishma Swali, directrice de la création de Chanakya, et vieille amie de Maria Grazia Chiuri.

Karishma et Maria Grazia se sont rencontrées pour la première fois dans les années quatre-vingt-dix, quand la seconde travaillait à la création chez Fendi, et cherchait des fleurs en tissu à rebroder sur le sac baguette de la griffe italienne.


Christian Dior - Spring-Summer2022 - Haute Couture - Paris - © PixelFormula



Leur nouvelle collaboration collective a donné lieu à une très belle installation sous le chapiteau où défilait Dior, au Musée Rodin. Elle deviendra aussi une exposition ouverte au public pendant six jours, poursuivant l’idée novatrice lancée par Dior, quand l’artiste Judy Chicago avait créé une installation géante représentant le corps féminin, dans un autre défilé de la maison dans ce même musée.

Dior travaille avec cette école de Bombay depuis 2016, et participe à financer une école des métiers d’art pour les femmes de cette ville, changement crucial dans une culture où ce type de savoir-faire est historiquement dominé par les hommes.

« Je pense que ce genre de collaborations est essentiel, doublement pendant le Covid, alors que la vie s’est transformée en une série de Zooms sans fin. Je crois aussi que ces savoirs-faire uniques et fait main sont sous-estimés dans de nombreuses cultures, justement parce qu’ils sont souvent l’apanage des femmes », réagissait Maria Grazia, en haussant les épaules.

« Si vous y réfléchissez, c’est incroyable que dans mon pays, l’Italie, il n’y ait pas de musée de la mode. Il faut aller au V&A à Londres ou au Louvre à Paris pour voir exposer mon travail pour Dior. Ce qui était un grand honneur. Il y a des musées de la mode à Londres, New York et Paris, mais pas à Rome. Incroyable !” se lamentait la couturière née à Rome.


 

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