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7 nov. 2012
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Le mélodrame familial Lacoste bénéficie finalement à Maus Frères

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7 nov. 2012

C’est un des traits particuliers des pièces dramatiques. Dès les premières lignes, un élément nous annonce le dénouement. Dans le cas de l’hallucinant mélodrame familial qui vient de secouer Lacoste SA, Michel Lacoste avait tout prédit dès fin septembre.
A cette époque, l’ancien président du groupe vient de voir sa favorite Marie Beryl-Lacoste être devancée par sa propre fille Sophie Lacoste-Dournel lors de l’élection, le 24 septembre, au poste de président du conseil d’administration. Il déclare alors amer dans les colonnes du Monde que selon lui le groupe suisse Maus Frères, détenteur de 35% des actions de la société, « a convaincu la moitié de (sa) famille de faire alliance avec lui pour prendre le contrôle ».

Sophie Lacoste-Dournel a décidé de céder ses parts au groupe Maus Frères. Photo JM Lubrano.


S’en est suivie une bataille âpre en interne et par médias interposés entre le père et la fille. Le premier attaquant même sa descendance en justice. Finalement c’est Michel Lacoste qui se tourne, le 27 octobre, vers l’actionnaire suisse, et propriétaire de Devanlay, le licencié textile monde de Lacoste. Avec le groupe d’actionnaires familiaux qui le suit, il livre plus de 30% des parts de la société au groupe suisse. Il explique son revirement dans le JDD par sa volonté de ne pas "mettre en péril" la société. "Nos querelles perturbaient le travail de ses équipes".

Alors qu’elle avait auparavant expliqué pouvoir exploiter son droit de préemption pour racheter les parts des actionnaires familiaux vendeurs, Sophie Lacoste-Dournel a en réalité jeté l’éponge ce matin alors que le délai pour une offre courait jusqu’au 12, entonnant à son tour le refrain de la pérennité de la société. « Nous devions racheter le bloc d’actions en entier, explique la dirigeante. Nous nous étions préparés. Mais nous ne nous attendions pas à un tel niveau de valorisation, à 1,25 milliard d’euros. Pendant ces dix derniers jours, nous avons étudié toutes les possibilités. On aurait pu avoir un partenaire financier, mais face à cette valorisation, cela nécessitait ensuite un tel niveau de rentabilité que cela aurait été au détriment de l’entreprise et du projet. Et, pour un chevalier blanc, cela engendrait un combat qui aurait pu pénaliser la marque et les salariés ».

Au-delà de l’abandon du projet de reprise de parts familiale, Sophie Lacoste-Dournel a annoncé la cession des plus de 28% des parts détenus par le groupe d’actionnaires qui était regroupé derrière elle. Maus Frères propose le même montant par action que ce qu'il avait négocié avec le groupe mené par Michel Lacoste.

Après avoir expliqué que « ce sont mes grands –parents qui nous ont légué ces actions à mes cousins et moi. Dans notre esprit nous devions continuer à faire grandir la marque puis les transmettre », la dirigeante a mis plusieurs secondes avant de tenter une réponse à la question "Pourquoi céder ces parts ?". Pour le groupe d’actionnaires familiaux, il semblait compliqué de rester au sein de la société sans pouvoir donner la ligne directrice. L’objectif de cette cession serait donc de « protéger la marque et son développement. Maus a depuis longtemps permis un déploiement de Lacoste dans les meilleures conditions. C’est un partenaire solide », renchérit la dirigeante. « Nous savons que la stratégie de Maus sera la bonne pour Lacoste ».

Les derniers détails de cette entente sont encore en négociations. On ne sait pas pour l’heure si des membres de la famille figureront dans le futur organigramme. Mais une fois l’accord entre le groupe d’actionnaires familiaux emmené par Sophie Lacoste-Dournel et le groupe suisse définitivement entériné, l’octogénaire maison française, qui a réalisé en 2011 un chiffre d’affaires de 1,6 milliard d’euros en ventes aux détaillants, sera à 100% helvétique. Comme l’avait annoncé Michel Lacoste…

Concrètement, ce changement majeur pourrait avoir une incidence en termes de coordination de l’offre Lacoste. La marque s’appuie aujourd’hui sur huit licences mondiales avec Devanlay, propriété de Maus et dirigé par José-Luis Duran, pour les vêtements et la maroquinerie, Pentland pour les chaussures, Procter&Gamble pour les parfums, Marchon pour les lunettes, Movado pour les montres, Zucchi Group pour le linge de maison et le groupe GL Bijoux pour les bijoux fantaisie. Jusque-là Devanlay se chargeait des boutiques et pouvait difficilement investir dans des flagships, en sachant qu’il n’en tirerait pas tous les bénéfices. A partir d’aujourd’hui, par exemple la donne change. Une nouvelle page devrait donc s'écrire pour la marque au crocodile...

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