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13 sept. 2019
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Lululemon : une stratégie européenne patiente et ambitieuse

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13 sept. 2019

Une présence sur La Parisienne, l'événement du sport féminin de la capitale ce début septembre. Un évènement, Sweatlife au 104 le 5 octobre visant à attirer quelque milliers de sportives et sportifs, après s'être tenu à Berlin et Londres précédemment. Et un premier grand magasin à Saint-Germain-des-prés : Lululemon montre les muscles à Paris.


La boutique de Saint-Germain des prés - Lululemon



Il faut dire que le label canadien, n’est pas un joueur modeste sur l’échiquier des équipementiers sportifs. La marque, fondée en 1998 par Chip Wilson, vise le cap des 3,8 milliards de dollars (3,4 milliards d'euros) sur son exercice 2019.

De quoi en faire l’un des acteurs fort du sport au niveau mondial. Un objectif revu à la hausse récemment à l’occasion de la présentation des résultats semestriels du groupe canadien. Sur son premier semestre, la marque, reconnue pour ses tenues de yoga et de sports en salle, a enregistré une hausse de 23% de ses ventes, à taux de change constant, à 883 millions de dollars. A périmètre comparable, sa hausse est de 17%.

Croissance annuelle d'au moins 30%

La direction de la marque, emmenée depuis un an par un nouveau DG, Calvin McDonald, vise les 4 milliards en 2020. Et s’est même fixé, en avril, un plan à cinq ans, baptisé "Power of Three" qui inclut, notamment l’objectif de quadrupler ses ventes internationales, sans toutefois détailler ce qu’elle réalise aujourd’hui en Europe.

« Cela concerne l’Asie mais nous avons la même ambition en Europe, explique Gareth Pope, le président Europe Moyen Orient Afrique de la marque. Nous avons des croissances à deux chiffres depuis notre arrivée sur le marché. Nous avons enregistré une hausse de 35% sur le dernier trimestre et, pour mathématiquement pour quadrupler d’ici 2024, nous devons maintenir ce rythme de progression annuelle entre 30% et 40%».
 Pourtant depuis son arrivée sur le marché, la marque canadienne n’a pas fait preuve d’un développement boulimique. Comptant moins d’une trentaine de points de vente sur le Vieux Continent.
 

Gareth Pope, qui a par le passé évolué chez Nike, développe l'activité de Lululemon en Europe - Lululemon



« Le plus gros challenge est de prendre le temps de grandir, de définir le nombre de marchés dans lesquels se focaliser. Je suis le deuxième dirigeant depuis le lancement européen. Nous gardons nos magasins à Zurich ou Amsterdam, où nous avons des membres fidèles. Mais nous nous focalisions sur la Grande bretagne, l’Allemagne et la France. Et à l’intérieur de ces marchés nous travaillons sur les villes clés ».

Construire une communauté

Cela fait déjà quatre ans que la marque a posé un premier pied à Paris mais elle n’est pas dans l’urgence de la constitution d’un réseau à l’enseigne. Elle a d’abord ouvert ce qu’elle nomme des showrooms, rue des rosiers, rue Saint Honoré et dans le quartier de Saint Germain des prés. Elle a aussi un espace au Bon Marché. 

Lululemon a, avant l’été, ouvert son premier magasins "mainline" qui lui permet de présenter une offre large et mixte, au 47 rue Bonaparte, dans le IVème arrondissement. En général, la marque ferme un showroom pour ouvrir en plus grand. C’est ce qu'elle s'apprête à faire dans le Marais.

 

Les cours dans les magasins, les partenariats avec les salles de sport et les évènements sont au coeur de la stratégie de la marque - Lululemon



« La différence de Lululemon, à l’inverse d’autres grands acteurs, est notre approche autour de la constitution de communautés. Cela crée une relation forte avec les membres. L’un des challenges est que cela prend du temps. C’est comme avec des amis, vous ne devenez pas amis avec quelqu’un en quelques heures. Et nous gagnons en notoriété lorsque 500 personnes en parlent à leurs amis, que ceux-ci se font leur propre expérience, puis que ceux-ci parlent de Lululemon à leurs amis. Ce sont des étapes. Nous devons atteindre la taille critique. Nous avons progressivement ouvert des magasins à Londres. Nous en avons dix. Et à présent nous commençons à ouvrir dans d’autres villes ». Ainsi la marque s’est installée à Manchester et Edimbourg et table sur de nouvelles villes. En Allemagne son approche est différente, du fait de l’importance des grandes villes. Si elle a deux magasins à Berlin, la marque possède aussi des implantations à Düsseldorf, Hambourg, Francfort et Munich.

Focus sur Paris

En France, le focus est mis sur Paris, où le marché n’est pas encore mûr pour accueillir un flagship et où il y a selon le dirigeant encore la place pour une petite poignée de magasins. Mais l’autre point clé pour l’expansion de la marque est que les tendances lifestyle vont dans son sens. « Le plus fort est cette tendance, le mieux nous fonctionnons, explique le dirigeant. A Londres par exemple, le nombre de studios de yoga, de salles de gym est tout simplement en train d’exploser. C’est maintenant une façon de vivre. Nous faisons des partenariats avec ces acteurs. C’est une tendance qui devient plus forte actuellement en termes de lieux, comme Barrys qui a ouvert. Nous sommes en contact avec des centaines de personnes à Paris et elles nous disent que cela devient très fort ici aussi ».

 
Si bien qu’au niveau global la marque doit faire face à une concurrence multiple. Beaucoup d’acteurs étant attirés par le succès de l’athleisure et proposant maintenant des leggings. « Nous voyons qu’il y a trois groupes de challengers. Les marques de sports verticalisées, des marques spécialisées, il y en a sur chaque marché, et les géants de la distribution de mode, comme Gap, Inditex et Uniqlo qui développent des produits aux prix très accessibles, mais ce sont d’autres prix, d’autres qualités de produits. Si vous voulez quelque chose qui dure cinq ou dix ans vous ne regarder pas là. Nous ne comparons pas à eux ». Et pour cause, le positionnement prix est totalement autre. Les leggings, catégorie reine de la marque que ce soit pour le yoga, le fitness ou le running (elle dispose d’un mur complet pour présenter tous ses modèles), coûtent entre 88 et 128 euros. Sa promesse : le confort et la technicité pour chaque pratique. Aussi pour convaincre la clientèle d’acheter, la marque veut lui faire tester son produit. Et c’est là qu’intervient le concept qui a fait ses preuves outre-Atlantique.
 

L'offre large de leggings est la marque de fabrique de Lululemon - Lululemon



La marque s’établit dans les villes et même les quartiers en créant des relations avec les clubs de sports, en recrutant des ambassadeurs (souvent des coachs sportifs) et en organisant des évènements dans ses magasins. Les espaces sont modulables et permettent la tenue de cours, ainsi en moyenne chaque semaines deux cours gratuits, accueillant entre 10 et 25 personnes, se déroulent dans ses points de vente.

« C’est une autre spécificité de Lululemon, l’autonomie des équipes, estime Gareth Pope. Chaque responsable de magasin a son propre budget pour organiser la vie de la communauté. Ils sont impliqués dans les projets, retranscrivent les valeurs de la marque. Les investissements sont dédiés aux ambassadeurs locaux, pas aux égéries planétaires. Et même lorsque l’on prend une figure comme le MVP du dernier superbowl Nick Foles, nous avons une approche différente. Nous croyons à une approche allant du terrain vers le haut. ».

Expertise matière

Ainsi, si outre Atlantique elles s’ouvrent à de nouveau sports, elle se focalisent sur son coeur de cible en Europe avec une offre pour l’homme et la femme axé sur le yoga, le fitness et le running. Et veut faire valoir une expertise sur la technicité avec des technologies et des matières, comme la Silverescent anti-odeurs, qui sont développées par son laboratoire R&D baptisé Whitespace. Car, en prime du développement des ventes en ligne et de l’omnicanalité, l’innovation produit est l’un des piliers stratégiques du plan de croissance à cinq ans de la marque. Forte dans les bas de sport, Lululemon veut pousser son potentiel dans les hauts. Cela concerne notamment la brassière, catégorie sur laquelle Nike et Adidas ont mené récemment l’offensive. Les équipes de la marque canadienne testent ainsi actuellement une technologie permettant de proposer un produit adapté à la morphologie de la cliente, à l’instar de ce qui se fait en chaussure avec les études de foulées.


Avec son modèle et cette approche sur le produit technique, Lululemon veut donc se faire une place bien plus grande sur le marché européen du sport. “Si l’on regarde l’Amérique du Nord, cela représente pour nous plus de 300 magasins, plus de trois milliards de dollars de chiffre d’affaires. L’Europe en tant qu’économie est l’équivalent de l’Amérique du nord, estime Gareth Pope. Des marques de sport sont présentes sur les deux marchés. C’est un beau challenge pour nous, mais il n’y a pas de raison que l’on ne se fasse pas une place”.

Tant que la tendance “healthy” monte en puissance, Lululemon possède en effet de solides arguments. 
 

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