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24 janv. 2016
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Pigalle ou le succès d'une mode de terrain, métissée et colorée

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24 janv. 2016

Des garçons de toutes origines, défilant avec des bombers pastel, des chapeaux, portant du vernis à ongle. Le mélange est roi chez Pigalle, marque lancée par un enfant du quartier, remarquée par des rappeurs outre-Atlantique et désormais adoubée par l'industrie de la mode.

Pigalle automne-hiver 2016/17 - Pixel Formula


Ses sweats à capuche et t-shirt barrés du logo noir et blanc Pigalle ont fait sa notoriété. Mais la griffe de Stéphane Ashpool, designer autodidacte, organisateur de soirées et entraîneur de basket, est devenue en sept ans plus qu'un label streetwear, adoptant une touche plus « couture ».

Sa dernière collection, présentée jeudi pendant la Fashion Week homme, était placée sous le signe d'« Eros », écho à la réputation du célèbre quartier parisien aux multiples sex shops. Une sensualité qui se reflète dans les transparences, ainsi que les broderies et les plissés réalisés par les ateliers des métiers d'art de Chanel.

Rose pâle et saumon colorent pantalons ou veste façon peignoir, portés avec des Clarks.

Pigalle automne-hiver 2016/17 - Pixel Formula


« Ce sont des mecs très masculins qui acceptent leur féminité, leur douceur », explique à l'AFP Stéphane Ashpool, autour de qui gravite une bande de copains, réunis dans un collectif, PainOchoKolat, officiant à la croisée du sport, de la musique et du monde de la nuit.

« Ce qui me fait vraiment kiffer, c'est la diversité en général. Quand on a commencé à faire des fêtes, on passait de Brel à du rap, en passant par de la house », raconte ce titi parisien, casquette sur la tête et pantalon large.

Sa marque de mode masculine, qui porte le nom de ce coin de Paris à la fois bobo et cosmopolite où il a toujours vécu, est le reflet d'une « jeunesse parisienne mixte, multiculturelle et créative ».

« J'adore le quartier. On dit que ça s'est embourgeoisé. Mais l'évolution ne me dérange pas tant qu'on garde un peu d'excentricité », dit ce trentenaire, né d'une mère danseuse, originaire d'ex-Yougoslavie, et d'un père anglais, sculpteur.

La success story commence en 2008, avec l'ouverture d'une boutique multimarque sur une place du quartier. Une ligne de vêtements Pigalle est lancée, des défilés en plein air sont organisés.

La notoriété de la marque explose quand les rappeurs A$AP Rocky et Drake mais aussi Rihanna s'affichent avec le logo. La marque collabore avec Nike, Apple.

Aujourd'hui, il a trois boutiques - deux à Paris, une au Japon -, les seules à distribuer la marque. L'assurance de vendre au « juste prix », dit-il. Qui, pour ces créations fabriquées à 70 % en France, va de 150 à 3.000 euros.

En juillet dernier, il remporte le prix de l'Andam récompensant les jeunes créateurs. A la clé, 250.000 euros et un an de conseils de Bruno Pavlovsky, président des activités mode de Chanel.

Le dirigeant, qui assistait au défilé Pigalle, se dit « assez impressionné » par la personnalité de Stéphane Ashpool. « Il sait exactement où il veut aller. Il est prêt à faire bouger des montagnes, et les montagnes bougent ! »

Le designer fourmille de projets mais ne veut pas d'une croissance à tout crin : « J'ai la belle vie, je voyage quand je veux, je mange dans des restos tous les jours, je n'ai pas envie de beaucoup plus ! »

Son objectif principal est de créer un grand atelier, pour y réaliser ses collections de A à Z, et aider à « valoriser le travail à la main ».

Ce basketteur se mêle aussi d'éducation. L'été dernier, les mannequins de son défilé « Ensemble » étaient des adolescents du quartier, pour qui il est à la fois entraîneur et « grand frère », et qu'il a emmenés en voyage aux Philippines.

Cet ancien élève turbulent aimerait un jour créer une école. Et s'imagine même maire du 9e. Dans un Paris meurtri par les attentats, il juge qu'il faut « s'entremêler un peu mieux » et « soigner les plaies avec des gens qui ont une nouvelle façon de faire ».

A l'instar de Pigalle, les quartiers du nord de Paris s'affichent désormais fièrement dans la mode: la réalisatrice Maïwenn arborait un t-shirt « Belleville Hills » au dernier Festival de Cannes, tandis que la marque Andrea Crews vient d'organiser un défilé en l'honneur de Barbès.

Par Anne-Laure Mondesert

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