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20 janv. 2020
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Scott Cutler (StockX) veut déployer le concept d'Inital Product Offering

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20 janv. 2020

A l’automne dernier, Adidas lançait trois versions de sa Campus 80 imaginées par des créateurs. Des produits exclusifs proposés via le site e-commerce StockX, spécialiste des sneakers. C’était la première fois que la marque allemande, via Adidas MakerLab, utilisait ce système d’enchères créées par le pure-player américain. Spécialiste de la revente de produits neufs, vintage ou d'exclusivités récemment sorties, StockX, créé il y a un peu plus de trois ans par Josh Luber, s’est distingué en établissant un modèle inspiré de la Bourse. Une approche qui lui permet par exemple de dire qu'en 2019 la Travis Scott Jordan 1 High était la basket la plus recherchée, que des marques haut de gamme comme Cactus Plant, Flea Market et FTP ont pris de l'ampleur dans le streetweat ou que la popularité des sneakers pour femme bondit. Surtout le site revendique plus d'un milliard de dollars en volume d'affaires l'an passé. La société a depuis initié un autre concept en parallèle de son activité principale : l’IPO, pour "Initial product offering". A l’heure où de nouveaux modèles viennent changer les habitudes d’achat des consommateurs, l’approche est pour le moins novatrice.
 

Scott Cutler, qui évolue dans le secteur des places de marché depuis deux décennies, a rejoint StockX l'an passé - StockX


"Nous pensons que c’est disruptif pour le retail, affirme Scott Cutler, PDG de la société rencontré à Paris fin 2019. Nous étions très honorés qu’Adidas fasse ce lancement de produits jamais réalisé avec trois créateurs qui n’étaient pas connus. Au final, nous avions des milliers d’enchères venues du monde entier pour un produit que les gens n’avaient jamais vu. Si vous analysez le prix final, il est plus élevé pour la marque que ce qu’elle aurait choisi en lançant le produit dans certains magasins. Ils auraient dû définir les marchés et les lieux auxquels allouer les 333 paires de ce modèle. Avec l’IPO, nous avons permis une mise à disposition globale. Et nous voyons même une seconde vie avec les collectionneurs qui recherchent les modèles sur la plateforme et sont prêts à payer encore plus."

Un nouveau modèle pour le consommateur et pour les marques. Du côté de StockX, le fait de toucher une base de clients élargie, de restreindre les contraintes logistiques et de limiter la frustration de « drops » à quantités limitées dans les villes clés d’Europe, des Etats-Unis ou d’Asie sont autant d'atouts mis en avant. Mais Scott Cutler veut surtout tenter de séduire les marques avec un argument majeur : le partage des données.

"C’est un nouveau modèle qui force les marques à penser différemment leur distribution et leurs priorités, estime-t-il. Pour la collaboration Adidas par exemple, nous avons plus de 10 000 personnes qui ont enchéri. La marque est capable de voir et connaître qui sont ces personnes prêtes à payer plusieurs centaines ou milliers de dollars pour un produit. De cette manière, le nombre de clients potentiels dont nous avons les informations peut être dix fois plus important que le nombre de clients que vous pouvez toucher si vous voulez vendre vos produits via le réseau physique."
 

Le modèle Adidas Campus 80 imaginé par le Britannique Alex Nash - StockX


Dans le cas de la Campus 80 d’Adidas, les enchères se sont envolées. Sur StockX, qui propose uniquement des produits neufs contrôlés par ses centres d’authentification, la société constate que près d’un quart des produits proposés sont vendus en dessous de leur prix de vente retail initial. Mais avec le concept d’IPO, quid d’une situation où le prix de la chaussure se situerait en-dessous de celui souhaité par la marque ?

"Les marques font des lancements de produits chaque semaine. Nous devons être capables de proposer des IPO pour tous les nouveaux produits qui arrivent sur le marché. C’est notre objectif final, affirme le PDG. Actuellement les marques réalisent cela via leur réseau, les revendeurs et les distributeurs. Ils décident de produire leurs chaussures et de les vendre. Parfois, le produit est sold out immédiatement. Mais sinon, son prix chute jusqu’à ce que quelqu’un décide de payer un certain prix. Tous les retailers savent que le prix baisse avec le temps. Avec notre formule, vous pouvez maîtriser ce que vous proposez plutôt que supposer ce que les consommateurs sont prêts à payer. Le prix ne change pas toutes les deux semaines, il bouge toutes les secondes. C’est une dynamique que seuls les marchés boursiers ont su créer.C’est pourquoi notre modèle est différent du retail."
 

StockX a lancé sa version française - StockX


Reste que les marques l’ont bien compris. Et Adidas comme Nike, dans une stratégie globale de relation directe avec le consommateur final, ont lancé leurs propres applications permettant de s’inscrire pour les prochaines sorties de modèles exclusifs. Sur une distribution plus classique, Nike a annoncé vouloir restreindre le nombre de ces partenaires internationaux à une quarantaine. Et a récemment mis un terme à son expérience avec Amazon.

"Je ne suis pas surpris par le départ de Nike d’Amazon, explique Scott Cutler. Je crois que de manière générale les marques sont en train d’essayer de construire une relation directe avec le consommateur. C’est un challenge pour elles de penser différemment. La plupart des marques ont une activité basée sur les multimarques et leurs distributeurs. Pour avoir une relation directe avec le consommateur, elles ont à présent besoin d’un e-commerce très fort et de magasins dans le monde entier."


StockX compte six centres d'authentification dans le monde - StockX


Au-delà de son concept d’IPO, StockX veut donc se présenter comme partenaire des marques pour consolider leur relation avec le consommateur final. Dans cet esprit, la société née aux Etats-Unis investit en Europe et en Asie. Elle a lancé ces derniers mois des versions en Italie, en Allemagne et en France pour répondre aux spécificités locales. Dans l'Hexagone, les Nike Air Max 1, les Adidas Yeezy Boost 350 V2 et Wave Runner 700 font partie des produits à fort succès. Pour répondre aux besoins locaux, un nouveau centre d'authentification a été installé à Eindhoven, aux Pays-Bas.

"Nous avons à présent six centres d'authentification, dont deux en Europe. Chacun contrôle des milliers d’objets chaque jour, et chaque fois avec le même procédé d’authentification", détaille Scott Cutler. Et de préciser : "L’authenticité est un facteur clé de la confiance avec beaucoup de subjectivité sur les produits déjà utilisés. C’est pourquoi nous avons choisi de nous concentrer sur l’état neuf. Je crois que nous devons limiter tous les éléments qui peuvent détériorer l’expérience pour l’acheteur et le revendeur. Nous avons déjà un business de plus d’un milliard de dollars. Sur notre site, vous verrez l’historique du prix d’un produit depuis trois ans. Et vous verrez ce que chacun en attend pour le vendre ou l’acheter.".

Inspirée par la Bourse, avec un volume d’affaires en plein essor et un patron passé par Ebay et le New York Stock Exchange, la société StockX apparaît comme un candidat naturel à l’entrée sur les marchés (IPO en anglais). Cependant, sa direction entend consolider son modèle et développer son activité à l’international avant de passer ce cap. L'entreprise de séduction est lancée. Elle devra convaincre les consommateurs, mais aussi les marques du potentiel de la plateforme.


 
 
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