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28 juil. 2022
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Birmanie: les ouvriers textiles sous le joug de la junte militaire ?

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28 juil. 2022

Depuis le coup d'Etat militaire de février 2011, les ouvriers de l'industrie birmane du textile-habillement, pilier de l'économie nationale, ont été particulièrement mobilisés face à la junte. Une situation qui les amènerait à être aujourd'hui une cible privilégiée des autorités, selon un rapport du Business & Human Rights Resources Centre. Qui évoque du harcèlement, mais également vols de salaires et heures supplémentaires forcées chez des fournisseurs de grandes marques internationales.


IndustriALL GlobalUnion



Le BGRRC, ONG qui suit le respect des droits humains de 10.000 entreprises dans 180 pays, indique avoir, via son réseau local, recensé une centaine de cas de non-respect des droits de l'homme et du travail, et qui concerneraient au moins 60.800 ouvriers textiles officiant pour 70 fabricants birmans. Des fabricants qui "ont récemment fourni", selon le rapport, quelque 32 grandes marques et détaillants internationaux.

Le BGRRC avance à ce titre les noms d'Adidas, C&A, Fast Retailing (Uniqlo), Guess, New Look, Next, Matalan et Primark. Mais également ceux de Bestseller, Inditex (Zara & Bershka), H&M et Lidl, dont les fournisseurs concentreraient le plus grand nombre de signalements. Sur les 32 entreprises que l'ONG a pu relier aux usines textiles concernées, seules 22 ont répondu à ce jour aux sollicitations de l'organisation.

Mais quelles formes prennent les abus selon les informations remontées du terrain ? Quelque 55 sites de production ont depuis le coup d'État imposé des baisses de salaires, voire des vols de salaires. Sur 35 sites, harcèlements, intimidation et abus sur les salariés auraient court. Le même nombre de sites sont concernés par des cadences de travail devenues abusives, ainsi que des heures supplémentaires imposées. Sur 28 sites sont également rapportés des violences et harcèlements liés par le genre des ouvriers (90% des ouvriers textiles birmans sont des femmes).

Sont également formulées des accusations "d'attaques" contre la liberté d'association, dans 31 usines. Témoignages qui ne font que confirmer des faits déjà dénoncés en mars dernier par l'agence américaine International Labour Organization. Le BGRRC pointe par ailleurs des refus de démissions (sur 17 sites), des collusions avec les forces militaires (16 sites), arrestations et détentions arbitraires (15), conditions de travail dangereuses (14) ou refus de signatures de contrats (8).

Travail infantile et assassinats



Sont également évoqués, pour trois sites, des cas de travail infantile. Et des cas d'assassinats dans deux usines. Selon ce rapport six travailleurs de Xing Jia Footwear, dont une représentante syndicale, auraient ainsi été abattus par militaires et policiers à l'occasion d'un rassemblement liés aux salaires non payés.


BGRRC



"Notre enquête soulève de sérieuses questions pour les marques qui continuent de s'approvisionner au Myanmar - et leurs investisseurs - quant à leur capacité à le faire de manière responsable et à assurer la protection des travailleurs", pointe le BGRRC. "Alors que la dictature persiste et que les travailleurs sont réduits au silence, le devoir de diligence renforcée constitue un défi de taille: il est peu probable que les marques et les détaillants puissent exercer une véritable surveillance des conditions dans les usines de leurs fournisseurs ou garantir le respect de leurs propres normes, ni remplir leurs obligations au titre des Principes directeurs des Nations Unies relatifs aux entreprises et aux droits de l'homme (PNG) et des Principes directeurs de l'OCDE à l'intention des entreprises multinationales quant au comportement responsable des entreprises".

Face à la situation birmane, l'ACT (Association for Contract Textiles), coalition de donneurs d'ordres, fabricants et syndicats, avait annoncé en décembre dernier suspendre ses activités en Birmanie. Décision prise après que le syndicat international IndustriAll, signataire, a indiqué ne plus être en mesure d'opérer librement dans le pays, depuis le coup d'État militaire du 1er février dernier.


BGRRC



Pas moins de 65% des exportations du pays reposeraient en effet sur le textile-habillement. Un secteur qui emploierait 1,5 million de travailleurs locaux. Profitant de la hausse des salaires chinois à la fin des années 2000, le pays s'est rapidement industrialisé pour se hisser rapidement au top 10 des fournisseurs de l'Union européenne en habillement, et est aux portes de ce top 10 du côté des importations américaines d'habillement.

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